Illustration et adaptation : Ronald Juliet
Quatre animaux – un âne, un chien, un chat et un coq – sont chassés par leur maître qui pense qu’ils sont inutiles. Il s’enfuient alors et décident de devenir musiciens à Brême. Chemin faisant, ils prennent possession, grâce à leur ruse, d’un refuge occupé par des brigands. Ce dénouement inattendu détournera nos quatre amis de leur route vers Brême. Cette histoire est parue en novembre 2008 et constitue la première production des Editions Paloma.
Brême: pôle d’attraction
C’est une ville portuaire située le long du fleuve Weser, à environ 60 km au Sud de son embouchure en Mer du Nord, et à quelque 100 km au Sud-Est de Hambourg, déjà réputée et riche à l’époque où se racontait notre histoire.
C’est le deuxième port allemand en tonnage et une ville industrielle importante dans les secteurs de la construction navale, de l’automobile (Mercedes), de l’aéronautique (EADS Airbus) et de l’agroalimentaire (Kellogg’s, Jacobs).
Brême a été l’un des membres actifs de la ligue de la Hanse et en a tiré une grande richesse aux XIVème et XVème siècles. Rappelons que la Hanse ou ligue hanséatique était l’association maritime des villes marchandes de l’Europe du Nord, autour de la mer du Nord et de la mer Baltique. Elle a joué un rôle commercial, puis politique du XIIème au XVIIème siècles, avant de disparaître pendant la guerre de Trente Ans (1618 – 1648).
Mais pourquoi veulent-ils aller à Brême ?
Les quatre compagnons avaient probablement entendu parler de la formation musicale « Stadt und Raths Musici » fondée en 1339 qui jouait à l’occasion de festivités et qui acceptait toujours dans ses rangs les musiciens ambulants de passage.
Sémantique du mot « banlieue »
On observe un glissement sémantique de « ban-lieue » vers « banlieue » : actuellement, la banlieue est perçue comme une zone d’exclusion mais il n’en a pas toujours été ainsi.
Le mot banlieue a acquis au fil des siècles une connotation péjorative puisqu’il rappelle la mise au ban, l’exclusion. Mais en fait, cette dérive est tardive, parce qu’au Moyen Age, le ban était l’étendue de la juridiction du suzerain, du seigneur (d’où l’expression convoquer le ban et l’arrière-ban). La banlieue était, vers les Xe et XIe siècles, l’espace d’une lieue qui entourait une ville dans lequel l’autorité avait juridiction. Ce n’était pas une zone d’exclusion. Ce n’est que plus tard, au XVIe siècle, que le mot ban a pris le sens d’exil, de rejet, et on retrouve cette racine « ban » dans mettre au ban, bannir, forbans, bandits.
En somme, on est passé de « se mettre sous la bannière de … » (sous la protection de …) à « être mis au ban de la société » (être exclu de la société).
Le succès du conte
L’histoire se racontait déjà au Moyen Age et il existait de nombreuses versions de ce conte. Autrefois, ce n’était pas des brigands que les animaux chassaient, mais des fauves: lion, loup et ours, animaux héraldiques de la noblesse. Mais c’était toujours des animaux moins nobles, errants, faibles, affamés ou vieux qui l’emportaient sur les forts, les nantis et les puissants. Cet ordre inversé a fait le succès du conte auprès des gens du peuple qui avaient pu connaître le même sort que les quatre animaux de l’histoire.
La renommée et la popularité du conte des Musiciens de Brême sont confirmées par les monuments qui leur sont consacrés aux quatre coins du monde (Zélinograde en Asie Centrale, Osaka au Japon). La ville de Brême a elle-même plusieurs monuments érigés en l’honneur des quatre compagnons